Pour la première fois en 30 ans, c'est à l'étranger et
sans nos familles que nous passons la période de Noël. Nous avons
d'ailleurs du mal à nous croire fin
décembre car aucun signe connu relatif à cette saison n'est là
pour nous le rappeler. Par chance, notre choix de demande d'hospitalité
quotidienne nous offre l'opportunité d'observer de près la vie
d'un foyer et de saisir la réelle émulation dans la préparation
de l'évènement.
Quand en France les grands symboles de la fête sont, dans le désordre:
le sapin enguirlandé qui perd ses aiguilles, le froid, la neige, la crèche,
les souliers au pied de l'arbre, la cheminée, la dinde fourrée,
les huîtres, le foie gras, le champagne, la bûche, les 13 desserts,
la messe de minuit, les cadeaux, la famille, le père Noël en tenue
rouge, les lumières dans les rues...en Amérique Centrale, au vu
des différences climatiques et religieuses, la célébration
s'est adaptée et se distingue de la notre par quelques particularités.
La chaleur amenant à vivre plus à l'extérieur, les décorations
sont dans les jardins.
Pas de sapins, vous l'imaginez bien, alors on choisit un arbre quelconque et
on le couvre de guirlandes. Eventuellement, à l'aide de fil de fer, une
structure conique est fabriquée pour donner la forme d'un vrai sapin.
A la nuit tombée, les maisons sont toutes illuminées de lumières
clignotantes.
Les crèches sont construites dans la rue, en carton, bois, tissu et plâtre
et si possible éclairées (nous avons rencontré une seule
fois une crèche de santons). Tout le voisinage participe de ses compétences
pour donner un air de fête au quartier.
Les stocks de pétard se forment et grossissent en vue de la fatidique
veillée. La naissance de Jésus ne passe pas inaperçue:
à minuit le 24 Décembre, feux
d'artifice et pétards se chargent de prévenir celui qui se serait
endormi. Les jours précédents, on en teste d'ailleurs quelques
uns, histoire de se mettre
dans l'ambiance et de vérifier qu'ils n'ont pas pris l'humidité...
L'Amérique Centrale comporte 99% de croyants dont une majorité
de catholiques. Pour ces derniers, il est une coutume qui à partir du
15 décembre, les amène à
jouer une pièce avec leurs voisins. Ce sont les POSADAS: simulant Joseph
et Marie à la recherche d'un lieu pour enfanter, des personnes frappent
aux portes des maisons et demandent hospitalité. L'échange est
un célèbre chant de Noël où solliciteurs et sollicités
prennent part, qui termine en une invitation à partager un goûter.
L'hôte prépare, dans l'éventualité de cette visite,
des "Tamales": sorte de pâte de maïs mélangée
avec des légumes et de la viande, le tout enveloppé dans une feuille
de bananier.
Le 24 Décembre, les festivités tournent autour d'un bon repas en famille, des échanges de cadeaux, des explosions de pétards assourdissantes et de la messe de minuit. Le repas typique qui peut durer des heures, se compose généralement de "tamales", de viande de porc ou de poulet grillée, de gâteaux, de fruits et de boissons gazeuses. Les cadeaux qu'apporte "Santa Claus"(le Père-Noël Américain) sont très souvent des vêtements pour les enfants, alors que les adultes échangent entre eux des pommes ou des raisins. Dans les familles plus aisées, et donc plus imprégnées de la culture Américaine, on retrouve les montagnes de cadeaux beaucoup plus "modernes" tant pour les enfants que pour les parents qui profitent de l'occasion pour un renouveau dans leur électroménager. La messe, ou célébration religieuse, est fréquentée par toute la population, et s'ensuit d'explosions de pétards. Cause de nombreux accidents, cette dernière coutume est remise en question chaque année par les politiques: Interdiction, vérification drastique de la qualité des explosifs (et par conséquence augmentation des prix), prise de conscience du danger par les utilisateurs... les méthodes ne sont pas toujours faciles à mettre en place. Au Honduras, le maire de San Pedro Sula a décidé cette année, que chaque parent amenant aux Urgences son enfant blessé par un pétard, paierait une amende...
Bien que Noël sous les Tropiques soit sensiblement différent de
Noël en Europe ou de Noël en Laponie, la notion de famille y est toujours
principale, alors, pour cette soirée, nous ne sommes allés taper
à la porte d'aucune maison et avons préféré camper
sur le bord d'une magnifique plage Costa Ricaine. Sable roux, cocotier, baignade
jusqu'au coucher du soleil et pique-nique aux chandelles...
Ce fut un joyeux et insolite Noël!
Les personnes à l'extérieur Les personnes à
l'intérieur
Au nom du ciel, Ici, ce n'est pas une auberge, Nous arrivons épuisés Peu importe votre nom La reine du Ciel Mais si c'est une reine Mon épouse est Marie, C'est toi Joseph Dieu vous rende, Messieurs Bénie soit la maison Ensemble Entrez, saints pélerins. |
Afuera Adentro En nombre del cielo Aqui no es mezon Venimos rendidos No me importa el nombre Posada te pide Pues si es una reina Mi esposa es Maria Eres tu Jose Dios pague senores Dichosa la casa que Juntos Entren santos peregrinos |
Ce fut la 4ème fois de notre voyage que nous avions l'opportunité d'être accueillis par des hôtes inconnus avec pour seul ticket d'entrée la recommandation d'amis communs. Pour cette dernière rencontre, nous étions assez excités car nos précédentes expériences nous avaient dévoilées que dans ce contexte, même un bref bonjour était toujours très chaleureux.
Nos premiers hôtes furent Paula et Nancho, à Huaraz au Pérou.
Nous étions recommandés auprès d'eux par leur frère,
expatrié en France et ami de la famille de Cyril. Leur accueil se révéla
extraordinaire. Nous ne les connaissions pas, mais en l'espace d'une soirée
nous avions partagé des moments aussi chaleureux qu'avec nos propres
amis.
La deuxième expérience fut en Bolivie, à La Paz. Cette
fois, nous avions fait la connaissance de Sébastien et Cathy, français,
amis d'un ami de Patricia. Jeunes instituteurs bien intégrés dans
le cercle des expatriés, nous les rencontrâmes au cours d'une pré-soirée
organisée dans leur appartement : ambiance relax, réflexions autour
du voyage et de la connaissance du monde, avec, délice suprême,
un verre de Pastis à la main…
Pour les troisièmes, le hasard se chargea de nous loger dans le même
hôtel qu'eux, à Granada au Nicaragua. Instituteurs à Tegucigalpa,
au Honduras, Pascale et Martin nous proposèrent d'eux même d'aller
les voir sur notre chemin. Nous passâmes chez eux un petit week-end à
la française, en famille avec de bons petits plats et une sortie ciné.
Après plusieurs mois de vagabondage, ce fut très agréable
!
Ce sont eux qui d'ailleurs nous donnèrent les coordonnées d'Agathe
et Thibault, notre oasis patriote à Puerto Cortes, au Honduras. Le jour
de notre arrivée dans leur ville, une problème technique nous
occupait l'esprit depuis les premiers tours de roues. La chaîne du vélo
de Cyril rendait l'âme. Cela aurait pu ne pas être un soucis majeur,
mais dans un système de transmission, quand une pièce trop vieille
doit être remplacée, il faut également penser à changer
les parties adjacentes. Nous avions bien une cassette arrière de secours,
mais pas de plateau central, or par ici, les normes de fabrication sont différentes
de celles de la France.
Arriverions-nous à trouver une solution pour poursuivre notre épopée
sans perdre trop de temps ?
La prise de contact avec Agathe et Thibault fut, pour Patricia, assez déstabilisante.
Nous pensions être annoncés, mais rapidement au cours de la conversation
téléphonique, nous nous rendîmes compte qu'Internet n'avait
pas rempli ses fonctions et que nous étions en train de demander la bouche
en cœur, l'hospitalité à des gens qui ne soupçonnaient
pas notre existence 5 min auparavant. Notre chance fut que nos deux compatriotes
avaient un sens de l'accueil peu commun et qu'en moins de deux, tels des prestidigitateurs
ils renversèrent la situation en nous donnant l'impression que nous étions
attendus de longue date comme leurs meilleurs amis.
Mis au courant de nos soucis techniques, Thibault avança une solution,
pas aussi optimale que nous l'espérions mais qui après réflexion
était la seule, et qui surtout avait des accotés très agréables
: il nous proposait de commander la pièce en France et d'attendre son
arrivée chez eux, dans leur superbe villa avec piscine… Cela signifiait
rester 6 jours chez eux … Ce n'était pas tant le temps qui nous
manquait, mais la gène de l'incrustation imposée qui nous faisait
réfléchir.
Sensibles à notre hésitation, ils nous jouèrent la carte
" c'est à nous que ça fera le plus plaisir ! " . Cela
nous fit céder…
Agathe enchaîna les repas de fête, les sorties visites, les sorties
pratiques. Thibault nous proposa Internet de son bureau et le réseau
de courrier de son entreprise. Les enfants, vifs et intéressés,
demandèrent :
-" Comment il s'appelle le monsieur qui a les mains sales ? "
-" C'est un nouvel ami, et … hum … il a les mains sales parce
qu'il a bricolé son vélo. "
Deux jours plus tard, durant le week-end, Cyril fut pris de forte fièvre
et de diarrhées. D'après les symptômes, cela pouvait être
le paludisme : par précaution nous entamâmes le traitement curatif.
Dès le lundi et les différentes analyses, le diagnostic révéla
une amibiase et vraisemblablement la dengue. Le temps de rétablissement
serait de plus d'une semaine.
Agathe et Thibault, désolés de cette nouvelle épreuve,
nous offrirent avec la plus grande humilité leur chaleureux cocon aussi
longtemps qu'il nous faudrait pour remettre Cyril sur pied. La vie s'organisa
presque autour des soins que notre malade nécessitait : des repas particuliers
de riz-carottes-bananes, un minimum de bruit pour ne pas le déranger,
des locations de cassettes pour se changer les idées…
Profitant du début de convalescence de Cyril, nous nous lançâmes
dans des tournois de belote garçons contre filles. Cela durait plus tard
qu'il n'aurait fallu et Thibault commençait à porter des valises
remplies des souvenirs de nos soirées, sous les yeux …
Enfin, après huit jours passés chez eux, notre plateau de vélo
arriva dans la valise de courrier de l'entreprise. Cyril n'était pas
complètement rétabli mais était en bonne voie. Principalement
grâce à Olivier, notre valeureux Webmaster, un de nos problèmes
était maintenant résolu. (Voir Histoire de vie)
Nous fixâmes le départ au samedi matin, deux jours plus tard, mais
Thibault qui ne profitait de nous que peu de temps les jours de semaine insista
pour que nous restions encore le week-end… Nous sentions l'amitié
parler, alors notre cœur répondit que cela serait avec le plus grand
des plaisirs !
Durant ces 12 jours, nous avions appris à nous connaître, nous
apprécier et à offrir le meilleur de ce que l'on était,
au-delà des recommandations intermédiaires.
N'est-il pas motivant de réaliser que l'hospitalité peut donner
naissance à l'amitié ?
A l'unanimité et après mûres réflexions, nous avons
décidé de décerner un " Rayon d'or " à
la famille De Certaines : Agathe, Thibault, Jacques et Arthur, pour leur sens
du partage et leur grand cœur…