Patricia et Cyril viennent de rejoindre la mythique ville d'Ushuwaiïa....qui marque la fin d'une grande étape : la traversée de l'Amérique du Sud à vélo pendant environ 6 mois.

Pour compléter leur carnet de route, et répondre à notre curiosité, nous leur avons avons posé quelques questions sur leurs 6 premiers mois de voyage.

1. A quoi ressemble le bout du monde ?

En se promenant tranquillememt dans la ville d'Ushuaïa, rien ne la differencie des autres villes touristiques du sud argentin. Sa rue principale vous offre une large panoplie de restaurants et agences de tourisme. Les "parillas" restent les meilleurs lieux pour deguster les grillades argentines à volonté. On y entre generalement vers 20h pour difficilement en sortir vers 24h, repus, le ventre tendu par tant de diversite de viandes ingurgitées (experience à vraiment ne pas manquer!).

Les maisons, principalement en bois et tôle plate, contrastent les unes aux autres par leurs vives couleurs. Agrementées d'un étage, elles proposent souvent aux toursites de jolies chambres en lambris (la Savoie semble si proche...). Les rues perpendiculaires au bras de mer partent a l'ascension des flancs vertigineux des derniers sommets andins.

Voilà reellement le cote magique de cette ville, cité coincee entre sommets enneigés et ocean. Une presqu'île permet d'admirer ce spectacle saisissant, où les glaciers parlent a l'eau glacee du Pacifique Sud, où les loups de mer et pingouins peuvent contempler les Andes, où les condors planent au-dessus des albatros, où chaque élément a son oppose à ses cotés.

L'ancien bagne transformé en musée vous fait plonger dans le riche passe de ce bout du bout du monde. Beaggle, Magellan, Darwin et bien d'autres, tant d'explorateurs sont venus ici... Que cherchaient ils? Qu'ont ils trouve? Je n'en sais rien. Cela étant ils ont tous laissés une trace de leur passage: leur nom a été donnéà une ile, à un detroit, un sommet. La plupart y ont perdus des êtres chers, un navire et parfois même la vie. Ici la nature ne pardonne pas.
Tout est beau, extrême et authentique. Elle vous met en face de ce que vous êtes... peut-être pour un nouveau depart? N'oublions pas que ce bout du bout du monde est aussi le debut d'un nouveau monde.

2. Vous allez retrouver votre vélo à Panama dans 1 mois : Est ce que vous vivez cette pause " sans vélo " comme des vacances ou comme une frustration ?

A vrai dire, c'est un peu les deux à la fois.
Cette longue pause nous permet de changer d'activité. Les 6 jours de trek dans le parc du "Torres del Paine" furent un vrai régal. En revanche, en laissant nos vélos au repos, nous redevenons des "touristes classiques": Les visages changent, l'accueil n'existe plus et les rencontres restent intéressées ou superficielles.
Ca fait bizarre de se retrouver considérés comme des Dollars ambulants... Cela devient alors pour moi une source de grande frustration. Je me rassure en me disant que le voyage va reprendre et que ce mauvais passage me fera doublement
apprécié les moments futurs.
J'en suis de plus en plus convaincu: le voyage à vélo c'est dur, mais vraiment magique. Nous allons également profiter à fond de la venue des parents de Patricia, de notre croisière dans les fjords chiliens et des quelques jours en 4*4.
En résumé, je peux avouer que ce mois de "pause vélo", n'a que desbons côtés, car il nous fait vivre de nouvelles choses et nous aide à en réalisé d'autres.

3. Est ce qu'après ces 6 premiers mois de voyage, vous pensez que partir en voyage un an est la bonne durée, et pensez vous déjà à une autre aventure similaire ?

Notre courte expérience du voyage en vélo rend difficile l'appréciation de la durée optimale d'une telle aventure. Les six premiers mois ayant été époustouflants, nous aborderons l'Amérique centrale avec enthousiasme et
impatience. Les bilans suivrons...
Concernant de nouvelles aventures similaires, les idées et projets ne manquent pas... le temps permettra leur maturation...

4. Est ce que ces 6 premiers mois de " nomadisme " vous donnent une envie folle de vous bricoler une vraie maison bien confortable au retour, ou est ce que vous pensez que vous investirez principalement dans vos voyages ?

A vrai dire, même si le voyage donne goût au voyage, il va bien falloir nous installer. C'est pourquoi l'idée d'une maison bien confortable nous tente. Dans notre imagination, elle sera un lieu d'accueil ou chaque voyageur a vélo pourra se reposer, recharger ses accus et se sentir chez lui, en famille.
En complément de nos prochains projets et voyages, cela nous permettra de laisser la magie des rencontres opérer.

5. Pensez vous que 6 mois de voyage vous ont changé, et en quoi ?

Je ne pense pas que le voyage change radicalement ce que nous sommes. Il apporte quelques nuances et révèle des vérités. Il nous ouvre les yeux, l'esprit et le cour; nous renvoie une image de ce que nous sommes, avec froideur et vérité. Grâce a lui, j'apprend quotidiennement sur moi, Patricia et autrui.
Le vélo, quand a lui, semble développer et affermir notre assurance ainsi que notre volonté. Mais attention, la puissance démesurée de la nature veille et sait très bien nous remettre en place le cas échéant.
Sachant que toute identité prend forme au milieu et part le regard des autres, nous en saurons d'avantage a notre retour...

6. Si je vous dis, je pars 3 semaines en vélo en Amérique Latine...Où me conseillez vous d'aller ?

Chaque lieu possède une magie... chaque voyageur ses coups de cour...

CHILI
Si vous avez 3 semaines en Janvier-Fevrier, la carretera australe chilienne entre Chaiten et Puerto Ibanez est un véritable paradis. Même si le climat y est très variable, cela vaut le coup de pédaler dans cette région. La piste sinue entre lacs et forets, fjords et glaciers, cascades et vallées encaissées.
Une courte pause dans un village de pécheurs vous permettra même de goûter les poissons du Pacifique sud.

BOLIVIE
Si vous avez 3 semaines en Juillet-Aout, que vous êtes en pleine forme et aimez la vie rude, le Salaar d'Uyuni et le sud Lipez vous attendent. Une mer de sel a perte de vue, des lagunes aux couleurs surprenantes, des geysers et eau thermales a plus de 4000m, les soldats pétrifies, des momies pre-hispaniques a ciel ouvert, l'air frais et le bleu turquoise des ciels andins; un monde à part, loin de toute modernité où le temps semble fige. Si vous y allez, prenez vous des réserves de nourriture car les ravitaillements sont quasi impossibles.

PEROU
Si vous avez 3 semaines en été et aimez les multi-activites, les parcours Cerro De Pasco - La Oroya et Huancayo - Ayacucho sont fantastiques.Le premier part de 4385m pour rejoindre la ville minière de La Oroya et ses 3700m. Les sommets enneiges, la pampa, un immense lac, des vallées encaissées, des rivières truffées de poissons, des Llamas, Guanacos et autres espèces s'offriront a vos yeux.
Au court du deuxième, vous cheminerez sur les flans vertigineux d'une vallée profonde. Canyons, parcelles cultivées, désert aride aux cactus ébouriffés, villages typiques; vous êtes en plein paradis Andin, en territoire Quechua. Le dimanche les autochtones se retrouvent sur les marches. Le brouhaha des discussions et les couleurs vives tes tenues enivreront tous vos sens... Ici vous été un Martien! Ayacucho, ville fief de l'ex sentier lumineux sera un lieu idéal pour se reposer et vivre la vie simple des montagnes. Ensuite, s'il vous reste un peu de temps, prenez un bus pour Cusco et découvrez la fabuleuse vallée Inca. Seul problème... c'est très touristique et une véritable pompe a fric! Cote relation avec la population, dommage que les Péruviens ne soient pas a la hauteur de la beauté de leur pays.

ARGENTINE
Ah... ces Argentins...
Si vous avez 3 semaines en Octobre-Novembre, l'Argentine vous permettra de rencontrer le peuple le plus chaleureux et le plus accueillant de nos 6 premiers mois de voyage. Le trajet Salta-Cafayate-Rioja est magnifique. Vous traverserez des cultures de canne a sucre, des paysages type "grand Canyon", le réputé vignoble de Cafayate. S'en suivra une longue montée dont l'ultime col vous ouvrira les portes d'une autre vallée plus verdoyante, voir tropicale.
Dans cette région, la sécheresse et la verdure se partagent constamment leterritoire. Seule constante, les perroquets. Chaque matin ils se regroupent, crient et fuient, rendant magique notre progression; spectacle saisissant!
Pour les plus courageux, aimant les vrais défis, la Patagonie reste votre terrain de prédilection. Le vent y est le maître absolu, le grand manitou. Il saura tester votre vaillance et ténacité. Heureusement, en fin de journée, épuise par tant d'efforts surhumains, l'accueil dans les Estancias vous donnera la force de continuer (CF. notre journal de bord).

7. Vous avez eu pas mal de galères avec la météo...Combien de jours de mauvais temps en 6 mois ?

Globalement la météo fut clémente a notre égard. Ceci étant, certaines régions nous ont particulièrement fait souffrir; soit par la pluie, la neige, la grêle ou plus dernièrement le vent.
Tentons-nous aux statistiques:
180 jours de voyage
10 jours dans les nuages ou la brume
15 jours de pluies incessante
5 jours de neige ou grêle
25 jours de vent violent

Soit tout de même 70% de bonne conditions climatiques.

8. Vous avez fait 7000 km en vélo, combien en bus, train ?

Restons donc dans les statistiques et tentons d'évaluer nos différents modes de déplacement en Amérique du Sud:
7000 km en vélo
3000 km en bus
280 km en train
400 km en bateau
10 m a la nage

9.On va décerner quelques " rayons " d'or :

-Le plus bel endroit ?

La nature est tres belle et va parfois bien au-dela de notre imaginaire...

Hors classement, le Salar d'Uyuni, qui ne rivalise avec autre site tellement il est different. Sur 12 000 kilomètres carrés(quasiment l'infini!), une etendue de sel nous offre sa blancheur immaculee. L'immensite est telle qu'en son
milieu, nos sens se troublent: on s'y sent fourmi, la notion de distance devient confuse et le silence qui y regne nous perturbe. Les seuls bruits audibles sont ceux du crissement de nos pas lorsqu'ils brisent les figures geometriques dessinees par les cristaux de sel... Voila un lieu propice a la meditation...
Sinon, nous avons elu un petit bout de canyon entre Oruro et Potosi (en Bolivie), pour le panel de couleurs qu'il nous a offert. La terre y prend une varietes impressionnantes des couleurs allant du vert au rouge en passant par le jaune, l'ocre, le rose, le violet... Les touches de couleurs s'y disposent d'une maniere tres elegante et si originale qu'il me semble que meme un peintre fantasque aurait du mal a l'imaginer !


-Le plus beau contact que vous ayez eu ?

Certainement notre rencontre avec Juan, le proprietaire d'une estancia en Patagonie Chilienne. Il nous acceuilli avec autant de gentillesse et d'entrain qu'il recevrait des amis. En nous offrant un lit, un feu, un bon gigot et en passant de longs moments a discuter avec nous, il a fait de nous les plus heureux des voyageurs. Nous avons alors compris que le partage de moments
simples est une source de richesse inestimable...


-La plus grosse galère ?

Hormis le vol de nos sacoches de guidon au Perou, nous nous refererons a la journee ou nous nous sommes retrouve bloqués par la neige au beau milieu de nulle part. C'etait en Patagonie Argentine et, en plus d'etre la plus grosse galere, cela a ete notre plus grosse frousse... (cf article dans Histoire de vie: une grosse frousse).


-Le plus grand Bonheur ?

Je ne sais pas si je dois le dire mais c'est...la demande en mariage que m'a faite Cyril...


-La plus belle surprise ?

Sans hesiter, quand 2 guanacos se sont rues sur nous pour nous faire la fete:

Depuis nos premiers coups de pedales sur les hauts plateaux andins, nous avons eu la chance d'observer un grand nombre de guanacos ou autres camelides. Nos rapports avec eux se limitaient a une observation respectueuse mais lointaine
car bien que tres curieux, les guanacos sont d'un naturel farouche.

Imaginez alors notre surprise quand , a peine arrives dans une estancia sur la route 40 en Argentine, 2 de ces bestiaux, que l'on savait sauvages, ont galope droit dans notre direction.
Notre surprise inquiete du premier instant s'est alors rapidemment transforme en crise de fou rire, car Libertador et Anastasia, en guise de bonjour, nous chatouillaient dans le cou avec leurs museaux tout doux.

Elevés depuis leur plus jeune age par le proprietaire de l'estancia, ils sont devenus de vrais animaux domestiques. Extremement curieux et joueurs, ils profitent de la moindre occasion pour se faire caresser et sentir de nouvelles odeurs. Leurs yeux en forme de bille, cercles d'une multitude de longs cils leur donnent un regard attendrissant et leur epaisse fourrure d'un joli roux venitien incite la caresse et est particulierement agreable au toucher: nous étions face a de veritables peluches vivantes avec lesquelles nous avons pris plaisir a jouer!


-Le plus bel exploit ?

Avoir parcouru 52 km en 6 heures 10 min. Vu les conditions exterieures l'exploit est un record. Le vent soufflait de face, de travers, en rafales et sans repit. Aucun abri en vue, nous n'avions d'autre choix que de terminer l'etape et d'arriver a la frontiere de Cerro Castillo. Les douaniers nous ont recuperes dans un etat tel, que sans meme avoir eu le temps de demander quoique ce soit, ils se sont organises pour nous chouchouter toute la soiree en nous
logeant dans leurs appartements.
La Patagonie dans son ensemble nous en a fait voir de toutes les couleurs et nous sommes assez contents d'en etre arrive à bout!